Après avoir établi le cadre et le nombre de cases qui ont été supprimées des planches initialement parues dans Fripounet et Marisette pour fabriquer l’album n°1 des aventures de Sylvain et Sylvette, je les ai « détachées » afin de mieux regarder leur impact éventuel sur le récit.
1°) la case n°3 de la bande n°3 (Planche de FM n°12 du 20 mars 1949)
Sylvain et Sylvette s’extasient devant le chant des oiseaux. Sa suppression n’entraîne aucun effet.
2°) la case n°3 de la bande n°3 (Planche de FM n°21 du 22 mai 1949)
c’est une case sans paroles qui visualise ce que Sylvain dit dans la case précédente « nous allons rentrer ». Pas d’altération de l’action.
3°) la case n°3 de la bande n°4 (Planche de FM n°21 du 22 mai 1949)
Sylvain commente ce qu’il vient de voir. Sa réflexion montre qu’il n’a pas reconnu Renard sous sa peinture verte et qu’il ne l’identifie pas comme une menace.
4°) case n°2 de la bande n°1 (Planche de FM n°22 du 29 mai 1949)
la case qui précède où Sylvette conclue en disant « pensons à autre chose » est pris au mot par Sylvain qui propose de manger des fraises. Sa suppression change le sens de la phrase de Sylvette qui devint une incitation sans contenu.
5°) case n°1 de la bande n°2 (Planche de FM n°22 du 29 mai 1949)
ce commentaire ironique du Loup sur Renard peint en vert est perdu et fait perdre le sens de la réponse de Renard « Ne plaisante pas ». Avec la suppression, cela semble s’appliquer à la 1ère réaction du Loup « Oh ! ça, ce n’est pas banal ! » qui passe difficilement pour une plaisanterie. Mais le récit n’en souffre pas.
6°) case n°2 de la bande n°5 (Planche de FM n°22 du 29 mai 1949)
Là, c’est une case d’action. Mais l’ensemble en comporte 4 : le loup se saisit de Renard, l’envoie dans les airs, le renard voit sa chute prochaine sur le banc, le renard percute le banc qui projette la cruche. La lecture n’en est pas perturbée. Comme le dit Bernardq, « l’ellipse n’empêche pas la compréhension » (76: La chasse à l'éléphant (la caisse)).
7°) et 8°) cases n°1 et 2 de la bande n°3 (Planche de FM n°23 du 5 juin 1949)
Ce sont des cases complémentaires dont l’absence ne manque pas. Elles montrent une fois de plus Sylvette dans un rôle optimiste et Sylvain qui réagit en décidant d’allumer un feu pour faire cuire les pommes.
9°) et 10°) cases n°1 et 2 de la bande n°5 (Planche de FM n°23 du 5 juin 1949)
Là, c’est différent. L’absence des 2 cases explique pourquoi, dans l’album, on passe du sanglier essayant de défoncer la barrière au sanglier prisonnier de ladite barrière. Avec elles, on comprend qu’ayant échoué à la renverser, il décide de passer au travers et s’y retrouve coincé. On perd sur cette dernière suppression un élément explicatif du récit. C’est comme pour l’album n°8 où Bernardq a montré que l’on va jusqu’à perdre 13 cases sur 2 planches.
On peut penser que le travail a été fait rapidement, car d’autres cases auraient pu être sacrifiées sans impacter l’action (par exemple la case 2 de la bande 3 de la planche n°22 et la case 2 de la bande 2 de la planche n°15 du 10 avril 1949. Mais des cases d’autres planches sont possibles. On a l’impression que le travail de suppression s’est concentré sur les dernières planches pour arriver au résultat comme pour se simplifier la vie, plutôt que de considérer planche par planche les cases à retirer.
Une autre explication, c’est celle qui s’appuie sur l’idée de Bernardq :
Rappelons tout d’abord une convention classique des histoires à suivre : la dernière case doit laisser un suspense pour donner au lecteur l’envie d’acheter le journal suivant afin de connaître la suite (voir Hergé, Franquin, et bien d’autres). Mais les découpages des albums étant différents, ce suspense de fin de page disparaît. L’éditeur aurait concentré les suppressions dans les dernières planches parce-qu’il avait le souci de trouver un suspens pour la fin de l’album, même si cela se faisait au détriment de la compréhension ou du détail de certaines actions.
NB : j’avais essayé déjà de regarder comment Fleurus avait procédé pour passer les albums de 20 pages à 16 pages. Mais c’était plus descriptif qu’analytique. Voir ici : Album n°59 versions 1973 et 1975 : une analyse